Ma vie d'avant « Ne m'oublie pas. » Non, jamais je n'oublierai. Jamais je n'ai oublié. Comment pourrais je oublier cette douceur, son parfum quand elle sortait de la salle de bain. Le sourire qu'elle avait quand elle m'attendait, à la sortie de l'école. La façon dont elle préparait à manger, sa façon de chanter, toujours cette même chanson démodée. La manière de s'émerveiller à chaque fois que je grandissait, prenait un centimètre ou deux. Son éclat lorsqu'elle me souhaitait mon anniversaire. Toutes les fois où son visage s'est décomposé lorsque je rentrais blessé, en sang, après une bagarre dans la rue. Je n'ai jamais oublié les fois où elle m'a engueulé. Le regard qu'elle a porté sur moi quand elle a découvert que je fumais, le premier préservatif qu'elle a trouvé, dans la poche de mon jean alors qu'elle, la fierté et la tristesse mélangées dans son regard. Je n'ai jamais oublié la façon dont elle m'a éduqué, les citations dont elle se servait pour m'apprendre la vie, pour me rappeler à l'ordre. Je n'ai jamais oublié ses dernières paroles, son dernier souffle. Ma mère est morte alors que je n'avais que vingt ans. Un accident, c'est ce qu'ils ont dit. Je n'y ait jamais vraiment cru, et j'me suis toujours promis, de retrouver la pourriture, qui l'avait écrasé et traîné sur cent mètre. Là sous mes yeux, alors qu'elle partait pour travailler.
Le lendemain je suis parti, j'me suis engagé, dans l'armée. J'ai passé des moments difficiles. L'odeur du tabac froid, de la transpiration. Le froid, le vent. Les cris de désespoir, de détresse, les supplications pour partir. J'en ai entendu, plein. La plupart n'avaient pas choisis d'être là, moi oui. Alors j'me démenais, alors j'mettais tout ce que j'avais. Parce ce que ça m'aidé à faire sortir cette rage, cette colère qui émanait de moi, depuis le jour de mes vingt ans. Je n'étais plus le même et j'avais besoin de redevenir celui que j'étais, celui dont elle était fière. Celui à qui elle souriait. Oui, j'avais besoin de redevenir cet homme là, et pour ça, il fallait que je me défoule, bien, que je prenne des claques dans la gueule. Il fallait que j'en chie. Parce que j'voulais oublier la douleur. J'voulais oublier cette haine, mais elle n'est jamais réellement parti. J'suis revenu à Tokyo et j'me suis engagé, une fois encore, dans la police, au fond, je sais toujours pas pourquoi. J'venait de rentrer de ce service militaire, et j'avais vingt trois ans. C'est tout ce que j'ai trouvé à faire de ma vie. | A Shinkyo Le dernier carton vient d'être déballé, tout est rangé, à sa place, l'appartement est à nous. Je viens d'emménagé, muté à Shinkyo, parce qu'il paraît que c'est un quartier à problème, entre les Yakuza et cette histoire de réincarnés. On a été plusieurs, à avoir été muté. Je n'sais pas à quoi va ressembler ma vie ici, j'y suis que depuis deux semaines. Ouais, deux semaines à peine. Elle est là, avec moi, ma douce. Ayame. Voilà maintenant trois bientôt quatre ans que nous sommes ensemble. Je l'ai rencontré, un jour de service, et je me souviendrai toujours du sourire qu'elle a affiché, lorsqu'elle m'a remercié, de l'avoir aidé à se relever. En ce qui me concerne ça a été assez rapide, un véritable coup de foudre, mais j'ai su. J'ai su être patient et la laisser venir à moi, en la guidant. Il y a eut des hauts et des bas, comme dans pas mal de couples, de jeunes couples. D'autant qu'on est aussi têtu l'un que l'autre, alors il y a des fois ou ça éclate. Mais ça ne dure jamais très longtemps. Elle a finalement accepté de venir avec moi, ici à Shinkyo, bien que ça ne la rassure pas forcément. Je lui ai promis qu'il ne lui arriverai rien, parce qu'elle est à mes yeux la seconde femme la plus importante à ma vie, après ma mère.
La vie ici est pour le moment calme, je n'ai pas encore eut de grand problèmes, mais je sais, je sais qu'il ne faut pas que je m'en réjouisse trop vite, tout peu arriver, à n'importe quel moment. Les yakuzas ne sont pas des anges, loin de là. |